>> 2 Janvier 2004Un voyage au long cours à travers l'Afrique, l'Australie et l'Océanie << 31 Janvier 2005
 

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Le journal de la traversée de l'Angola par KapSud
Auteur kapsud
Source KapSud
Publication du 10/07/2004 pour Internet
Modifi� le 28/07/16
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Arrivé à Ceuta

 

Mardi 27 Avril

Nous franchissons la barrière et le militaire nous montre du doigt les bureaux où nous devons nous rendre. Mis à part l'attente du monsieur chargé des passeports étrangers, les formalités se déroulent rapidement et même dans la bonne humeur. La route est vraiment mauvaise et truffée de militaires armés qui marchent en plein milieu. Dans les nombreux villages disséminés le long, on nous salue en nous montrant le poing fermé avec le pouce levé comme pour nous dire que c'est super qu'on soit venu ici. 

Nous retrouvons du bon goudron à Cacongo, où au point de contrôle on nous envoie en ville pour nous autoriser ou pas à continuer. Là bas, la personne concernée nous redirige vers les services d'immigration de Cabinda. Nous y arrivons à midi, et grâce à un jeune rencontré à l'Alliance Française, ces dernières formalités sont réglées rapidement.

On va à la banque pour changer de l'argent et c'est le banquier lui même qui me désigne les gens avec qui je change directement  nos CFA en Kwanzas. Il ne nous reste plus qu'à filer directement à l'aéroport pour une mission bien plus délicate : trouver un avion pour mettre Totoy dedans et nous avec, pour atterrir directement à Luanda et éviter ainsi la République Démocratique du Congo ou Congo Kinshasa. Cette idée très originale nous a été donnée par un autre voyageur français qui nous a précédé de quelques mois et qui a utilisé ce moyen de transport si particulier (Un grand merci à Guillaume pour le tuyau !).

En fait plusieurs fois par jours des avions cargos militaires atterrissent et décollent vers Luanda. Il faut juste arriver à y monter dedans ! Bien sûr, cela n'a rien d'officiel, il faut juste trouver les bonnes personnes. Nous cherchons en premier lieu à l'aéroport et on tombe sur un homme qui parle français et qui se propose comme intermédiaire pour notre négociation avec le chef de la base militaire. Il nous dit de revenir en début d'après midi le temps qu'il traite notre cas. Pendant ce temps, on va manger dans une gargotte en face de l'aéroport. Notre négociateur nous rejoins accompagné d'un officiel vu le badge qui est suspendu à son cou. C'est d'accord pour notre prix, rendez-vous à 15 heures sur le parking de l'aéroport. Quand on se gare sur le parking l'homme nous attend mais pour dire que l'avion prévu est plein. Il faut revenir demain matin à 9H30.

Il nous faut passer la nuit ici. Malheureusement pour nous Cabinda vit de l'industrie du pétrole et le dollar y est roi. Les tarifs proposés pour une nuit dans des hôtels pour travailleurs du pétrole sont exorbitants rien à moins de 100 euros. De toute façon, très peu d'hébergements sont possibles. On se rabat sur les missions catholiques mais mon portugais plus que rudimentaire ne nous permet pas d'obtenir satisfaction. Lassés de tourner en rond, nous revenons à l'Alliance Française où José nous prend en charge et fait le tour de la ville avec nous pour nous aider. Il convainc les soeurs de la mission et après l'avoir ramené chez lui, nous nous installons dans la cour de l'école.

 

Mercredi 28 Avril

On se lève avant le début de l'école pour ne pas trop perturber le fonctionnement. Mais la cour est très vite remplie d'une nuée d'élèves qui sont très matinaux et visiblement impatients d'aller en classe. A peine arrivés au parking de l'aéroport, un militaire de la base d'à côté vient nous chercher et nous dit que le vol de 15h est confirmé et qu'on peut venir directement vers 14 heures. Ayant quelques heures a tué, nous parvenons, toujours grâce à José, à dégotter un cybercafé extrêmement lent mais il marche ! Le resto qu'on trouve est à l'image de la ville, on dirait qu'elle est "ravitaillée par les corbeaux" comme on dit : sur une carte de 4 pages de menus, seule une salade est possible !

14 heures pétantes, on arrive à la base. le gardien nous laisse entrer sans problème. On nous montre où on doit se garer. Le temps passe mais pas d'avion pour nous. On s'installe pour faire un scrabble. Il y a beaucoup de va et vient de voitures et de piétons dans la base. C'est la fin de l'après midi et toujours rien. Une voiture passe et s'arrête. Un blanc nous demande en anglais s'il peut nous aider. On lui présente notre cas et il nous répond que ça va être compliqué car notre voiture est trop grosse pour les avions cargos habituels. Diagnostic que nous confirme Andrej un de ses amis russes qui est venu examiner Totoy à sa demande. Le modéle d'avion permettant d'emporter Totoy est un Antonov 12 et il n'y en a aucun de prévu aujourd'hui. Nitzan, qui est israélien, nous propose de parler directement au commandant de notre cas car il le connait bien. Plus tard, on nous fait signe de rentrer dans les bureaux. Le commandant est là, il nous offre une bière et parle avec Nitzan. Il appelle ensuite un collègue à Luanda et parle d'un Land Cruiser blanc demain à 9 heures, raccroche puis nous met la télé satellite française, nous fait signe qu'il revient et s'en va. Nitzan le suit. Nous attendons un petit moment. Puis la nuit tombe. Pas mal de monde s'affaire autour de nous. On entend un avion qui décolle puis plus rien. On attend.

A 21 heures, tout le monde semble parti et on se retrouve tout seul dans le bureau. On trouve enfin quelqu'un et on essaie de lui faire comprendre notre situation très particulière. Il appelle le commandant qui nous a à priori oublié, et on comprend qu'on doit revenir demain matin à 7 heures. Comme c'est trop tard pour retourner à la mission, on va à une pension médiocre où on est arrive à négocier un prix si on part avant 6 heures du matin ! 

Jeudi 29 Avril

Lever 5h15. On va direct à la base. On se fait le petit déjeuner sur place. On attend l'avion de 9h mais il n'est pas là. On ne comprend pas trop. Peut-être qu'on a mal interprété et que c'est 9 heures du soir mais pourquoi nous faire venir à 7 heures du matin ? Toujours est-il qu'il faut se contenter d'attendre. A la base, tout le monde nous connait maintenant et nous salue. On a le temps de discuter avec Jolie une secrétaire qui parle un peu français car elle a été réfugiée en RDC ou avec le commandant en 3 de la base. Il est subjugué par notre voiture qu'on fait visiter à un peu tout le monde d'ailleurs. Andrej, qui de par sa fonction est informé des plans de vol, nous dit qu'il n'y a pas de gros avion prévu aujourd'hui tout en soulignant que ça peut changer beaucoup dans la journée. Ca ne nous encourage pas mais on attend quand même. Ce coup-ci on déballe la table et les chaises et on essaie de s'occuper tant bien que mal dans la chaleur ambiante. On attend ainsi toute l'aprés-midi. Régulièrement quelqu'un de la base passe en disant que leprochain avion est le bon. Mais la nuit tombe et rien pour nous. On attend très tard, jusqu'à 9 heures car on ne sait jamais. Mais Nitzan qui nous a reconnu dans l'obscurité sur le tarmac nous dit que ce n'est pas la peine de rester là. On n'a vraiment pas le moral et on décide de se payer un des deux hôtels de luxe pour se remotiver. En fait ça n'a rien de luxueux, c'est juste un niveau un peu élevé et surtout très cher. 

Vendredi 30 Avril

Comme maintenant on connait les habitudes de la base, on sait que ce n'est pas la peine d'être trop matinal. On s'arrête juste avant acheter du pain frais et tout le marché nous reconnait. On arrive à la base et on fait notre petit rituel, On dit bonjour à tout le monde, on sort notre table et les chaises et on s'installe pour le petit déjeuner. A notre grand regret on voit le même scénario de la veille qui se déroule. En plus le commandant est parti et ne revient que dimanche. Le problème c'est qu'on n'a pas beaucoup d'autres possibilités. Le bateau de toute façon ce n'est pas plus prévisible que l'avion et c'est aussi cher. La route, nous n'avons pas étudié cette option car ça nous oblige à passer par la RDC alors qu'on n'a pas de visa et réentrer en Angola pour lequel on a épuisé notre visa à entrée simple. On s'en veut de s'être coincé dans ce coin perdu et si cher.

C'est vraiment épuisant pour les nerfs car on comprend à peine un peu de portugais et on ne sait pas trop ce qui se passe. Sans cesse c'est le chaud et le froid qu'on nous souffle dessus. On est obligé de rester à la base au cas où, et rien n'arrive. Tous nous disent qu'il y a un très gros avion pour nous bientôt, juré, craché, promis. Mais à chaque fois, ce sont toujours des petits avions cargos qui embarquent des marchandises et aussi beaucoup de passagers civils ou militaires qui font ainsi la navette entre Cabinda et Luanda en payant bien sûr le commandant avant tout qui redistribue à l'équipage. On est sans cesse ballotté entre espoir et désillusion. C'est assez pénible. Demain, si on n'est pas encore parti on ira en premier lieu se renseigner au port. 

Heureusement, les gens sont super sympas avec nous. On arrive à discuter en baragouinant un peu de portugais et d'espagnol. Et puis beaucoup de personnes parlent un peu le français car ils ont vécu en RDC à cause de la guerre. C'est ainsi qu'on entend souvent la réflexion assez déconcertante : "J'aimerais bien faire votre métier de touriste". Ils croient qu'on est payé par le gouvernement pour visiter les pays ou qu'on va écrire un livre et le vendre. On a dû mal à leur faire comprendre qu'on ne gagne rien (au contraire !) et qu'on fait ça car c'est notre rêve depuis toujours. Je crois que notre réponse les surprend autant que nous avec leur question. 

Toujours est-il qu'on est presque les derniers à partir de la base. Nous avons fait nos adieux à Andrej car il part en week-end à Lobito. Sans notre source d'informations la plus fiable ça va être encore plus dur. Nous testons encore une autre pension à qui on diminue le prix demandé de moitié vu qu'il n'y a pas d'eau courante. Ms à part ça, c'est un logement correct qui reste abordable.

 

Samedi 1er Mai

Ce matin nous changeons d'itinéraire et partons nous renseigner au port. Le bateau qui fait la navette entre l'enclave de Cabinda et l'Angola est encore à Soyo et il repartirait d'ici lundi matin. Une vague idée du prix et l'obligation de boucler l'affaire dimanche matin au plus tard sont les seules autres informations que nous arrivons à obtenir. On a au moins un plan de secours même si ça fiabilité est douteuse. On retourne à notre chère base. Les jours défilent et pendant ce temps notre durée de visa raccourcit à vue d'oeil. 

En milieu de matinée, il commence à avoir une activité inhabituelle autour de notre voiture. Beaucoup de monde passe et la jauge du regard. Puis soudain le commandant en 3 vient nous voir. Il nous dit qu'il y a un avion cargo qui vient d'arriver pour nous et si on veut, il s'occupe de tout à condition qu'on lui donne l'argent. On est OK même si on n'aime pas payer avant d'avoir le service ! On attend, fébrile. On enlève tout ce qu'on a sur la galerie et on le case tant bien que mal à l'intérieur. A peine fini, il faut partir sur le tarmac. On ne sait pas encore comment on va monter dans l'avion ! 

Les passagers descendent, puis les marchandises sont déchargées à coup de trans-palettes. On vérifie nos passeports. Ils installent une sorte de rampe et on nous fait signe de monter. On s'engouffre dans la carlingue. C'est un équipage russe qui pilote nos manoeuvres. Ils arriment la voiture. Pendant ce temps les passagers s'installent avec leurs bardas harcelés par les manoeuvres angolais. Ca parle russe et ça hurle portugais, on est un peu perdu. La moindre place est occupée. Les hélices rugissent, la porte se ferme, on se cramponne à nos sièges, attachons nos ceintures (si, si !) et l'avion décolle. On y croit à peine et pourtant c'est bien vrai, on est dans la voiture, confortablement installé et Totoy vole au dessus de la côte angolaise. C'est vraiment la chose la plus extraordinaire qu'on a faite jusqu'à maintenant ! Jamais, il y a quelques semaines encore on aurait imaginé cela. En quelques minutes, les interminables heures d'attente sont effacées.

Une heure après, nous atterrissons à Luanda. Nous devons refaire un certain nombre de formalités. Les officiers, dans un premier temps peu amènes, se révèlent finalement sympathiques et nous sommes peu après lâchés dans cette immense ville, sans aucun plan bien sûr. Nous tentons de nous diriger vers la côte, mais nous avons du mal à nous repérer. La circulation est dense et il y a beaucoup de routes. Nous traversons d'immenses bidonvilles cernés par des montagnes de détritus qui dégagent une puanteur extrême dans cette chaleur. C'est un vrai capharnaüm dont on arrive quand même à se tirer en essayant systématiquement d'aller vers la mer. Heureusement, nous avons des indications grâce à notre ami Bernard qui vient régulièrement en mission de travail ici ce qui nous évite d'être complètement perdu. On continue vers la "Ilha" une petite île reliée à Luanda par un pont, quand, soudain, on aperçoit des tentes de toits sur des Land Rovers. Ca doit probablement être les 2 couples d'américains qui nous précèdent et avec qui nous sommes en contact par email depuis le Gabon. Comme on est mort de faim après toutes ces émotions, on va d'abord se payer un bon repas dans un cadre superbe : nous faisons face à Luanda et ses superbes immeubles coloniaux. 

 

 

Repus, nous faisons demi-tour pour retrouver nos tentes de toit. On les trouve au Club Nautique et on débarque en disant que c'est nous les Français. En fait il y a 4 véhicules de voyageurs.  Nous faisons ainsi connaissance de Slade, Krissi et Vicky (1 couple sud-africain anglais avec une amie anglaise) qui voyagent depuis 9 mois, de Urs et Elza (1 couple suisse français) et leur chien Bayo qui sont partis depuis 16 mois et de Jenifer, Witt, Graham et Connie  nos fameux "américains" qui ont démarré depuis un peu plus de 3 mois. Tout ce petit monde s'est rencontré au fur et à mesure de leur pérégrination et maintenant, ils voyagent ensemble. On s'abreuve de questions et de récits, tout cela en anglais bien sûr vu le groupe très cosmopolite. Seule Elza parle français et on la met fortement à contribution pour ses talents de traductrice. Bref, le temps passe très vite, ils nous invitent à se joindre à eux pour dormir ainsi qu'à un barbecue auxquels ils sont conviés. On est un peu pris dans le tourbillon et on accepte. 

La barbecue-party passe très vite à discuter avec des expatriés français invités et nos nouveaux compagnons de voyage. Nous apprenons par la même occasion que nous sommes conviés à une sortie à la presqu'île de Moussolo et que grâce à son organisateur angolais, Mario, nous avons une liste de points GPS pour la suite du parcours.

 

Dimanche 2 Mai

Nous partons juste après le lever du soleil avec notre nouveau groupe pour un programme complètement imprévu. Rob et Mario, nous servent de guides pour sortir de la ville tentaculaire et nous quittons la route pour la piste de la fameuse presqu'île. Nous avançons de plus en plus dans le sable. A droite, la lagune formée par l'avancée de la mer dans les terres, à gauche l'océan atlantique dans toute sa vigueur. La langue de sable se fait de plus en plus étroite jusqu'au moment où nous pouvons apercevoir ces deux mondes aquatiques en même temps. C'est magnifique. 

Nous longeons la côte sur l'océan et nous sommes obligés de dégonfler les pneus pour éviter de nous planter dans le sable. La terre gagne du terrain et des îlots de palmiers surgissent dans cette savane plane, sèche et sableuse. Encore quelques kilomètres et nous traversons la presqu'île en largeur, pour atterrir sur une superbe petite plage côté lagune avec un campement aménagé. C'est le campement de vacance privé d'un ami à Mario du club de 4x4, qui nous le laisse carrément à disposition.  

Nous passons l'après midi à lézarder au soleil, à chercher des clams de l'autre côté même si on rentre bredouille. Je me remets doucement à l'anglais pour discuter avec nos nouveaux amis. Quant à Mario, qui parle couramment anglais et français, il nous donne d'innombrables informations sur l'Angola, un pays qu'il aime passionnément et qu'il connait en profondeur pour avoir participer entre autres à des déminages et à des réouvertures de route après la guerre. Il est aussi un grand voyageur puisqu'il a parcouru avec sa femme il y a quelques années, l'Europe et le Moyen Orient pendant 2 ans. Bref, un homme passionnant à plus d'un titre.

Cette journée de vacances, qui nous permet de décompresser de notre stress cabindais, s'achève par un bel apéro autour des succulents sushis préparés par Connie et d'un barbecue dans la plus pure tradition sudafricaine. 

 

Lundi 3 Mai

Nous quittons le clan provisoirement pour rejoindre Luanda après deux heures de route. Ici tout est étrange. On change son argent dans les supermarchés dans un guichet au milieu des rayons de conserves et de bouteilles, les caisses sont équipées de machines pour compter les billets car vous devez sortir d'énormes liasses de kwanzas pour régler quelques courses et le plein complet de gas-oil, soit 260 litres, qui habituellement est une opération plutôt douloureuse sur le plan financier est ici un vrai plaisir : 8 kwanzas le litre soit à peine plus de 8 centimes d'euros ! Cette ville est remplie de bien d'autres contrastes. La misère la plus totale côtoie des hôtels de luxe, de superbes bâtiments coloniaux cachent des bidonvilles minables, des hommes d'affaires pressés croisent des pêcheurs en guenilles. Pourtant, avec son boulevard Marginale qui longe le front de mer et sa presqu'île de Ilha, cette cité dégage un atmosphère attachante qu'on ne pourra malheureusement pas approfondir.

Nous devons aussi prévenir les différents contacts que notre ami Bernard qui vient régulièrement en mission en Angola, avait activé pour nous, pour leur signifier que notre programme est bien chamboulé par la jonction avec le groupe de voyageurs. Nos objectifs atteints, nous repartons rejoindre les autres à la presqu'île de Moussolo. Nous arrivons à la nuit tombée mais notre journée n'est pas terminée. Nous leur avions promis un apéritif spécial alors, pour cette occasion si particulière, nous ouvrons le bocal de foie gras fait par ma maman, que nous transportons depuis la France. Il a un peu souffert mais il est véritablement délicieux et ça fait tellement de bien de partager sous ces latitudes avec de nouveaux amis !

 

 

Mardi 4 Mai

Nous devons nous résoudre à quitter ce coin merveilleux et nous partons en convoi vers le sud. Les paysages arides sont superbes. La côte et l'océan d'un bleu azur ne sont jamais très loin. Cela nous fait un penser à la Grèce. Nous découvrons aussi une nouvelle flore dont cette plante style aloès avec des hautes hampes de fleurs rouge orangées. Les baobabs torturés refont leur apparition. De temps en temps on passe des villages aux cases rouges comme la terre. Chaque fois que nous croisons quelqu'un à pied ou en voiture, c'est un grand sourire qui illumine son visage avec un salut chaleureux de la main. 

En fin d'après midi, on tente une piste qui rejoint la mer pour bivouaquer. On arrive dans un modeste village de pêcheurs. A cause de la marée, il n'y a pas assez de place pour nous tous. Nous revenons un peu en arrière pour nous installer dans la brousse. Nous avons même droit à une superbe éclipse de lune comme spectacle de fin de soirée.

 

 

Mercredi 5 Mai

Nous reprenons la route qui trace dans ces étendues sèches. Porto Amboin, est visible de très loin avec son anse magnifique et la falaise qui la domine. La terre aux alentours est très claire presque blanche et toutes les maisons, faites de cette terre, sont d'une blancheur éclatante sous la lumière crue du soleil. Nous allons dans le village et  essayons de trouver des langoustes à acheter au pêcheurs mais en vain. Il n'y a pas non plus de poisson frais. Seulement une multitude de poissons de toute sorte qui sèche sur des claies. 

Nous poursuivons notre périple. A un moment, nous surplombons une vallée d'un vert incroyable. C'est une véritable oasis dans laquelle nous nous engageons. Tout le long de la route, des gens nous proposent des sortes d'écrevisses, crues ou déjà cuites en brochettes. Le vert des prairies marécageuses et le bleu des étendues d'eau contrastent vivement avec les teintes marron ternes des collines environnantes. Nous arrivons ensuite aux chutes d'eau que nous a indiquées Mario. La végétation luxuriante qui les entoure est un véritable bain de fraîcheur. Mais pour certains de nos compagnons ça ne leur suffit pas et ils se font un plaisir de plonger dans les eaux limpides du bassin de la cascade. C'est le lieu idéal pour notre pique-nique.

Nous repartons pour rejoindre la côte et y trouver une plage romantique pour célébrer l'anniversaire de mariage de Slade et Krissy . Nous avons décidé de leur préparer une surprise : cocktail en amoureux face à la mer et diner aux chandelles. On s'amuse comme des gosses à préparer ce petit évènement !

 

Jeudi 6 Mai

Nous poursuivons notre descente vers le sud. La route quitte peu à peu la côte pour s'enfoncer un peu plus vers l'intérieur. Les paysages sont rudes mais toujours aussi beaux. Il y a de moins en moins de villages. Les étendues que nous traversons sont immenses et notre petit convoi s'étire sur le long ruban d'asphalte. 

La grande ville de Lobito nous donne l'opportunité de faire les derniers ravitaillements avant d'attaquer la partie plus isolée de l'Angola. Le peu que nous apercevons de la ville est un peu à l'image de ce que nous avions vu à Luanda, un fort contraste. On voit de beaux bâtiments coloniaux restaurés perdus au milieu des bâtiments modernes sans âme le tout étant cerné par des quartiers populaires ou bidonvilles très étendus. Nos compagnons n'aimant pas s'attarder en ville, nous ne sauront pas si le front de mer qui est aussi beau que celui de la capitale.

Nous quittons plus loin le goudron pour de nouveau une piste qui nous mène à Baia Farta, une avancée rocheuse dans la mer. Nous trouvons ainsi un beau bivouac sur la plage, non loin d'un village de pêcheurs.

 

Vendredi 7 Mai

L'état de la route se dégrade lentement mais sûrement. Les paysages sont toujours aussi secs et presque désolés. On a parfois l'impression de se retrouver au Maroc avec ces montagnes où la roche est plus présente que les arbustes. Plus tard, la descente d'une colline nous offre un point de vue surprenant : des champs, des jardins et des plantations de bananes à perte de vue. Nous sommes à Dombe Grande qui a la chance de pouvoir irriguer ses terres et de suite c'est une véritable explosion de vie. Il y a du monde partout avec des petits marchés où les producteurs vendent le fruit de leur travail. Nous en profitons pour faire une halte gaie et colorée à l'un d'entre eux. Nous y mangeons les meilleures bananes que nous avons goûtées jusque là. L'endroit est très animé et ça a l'air d'être un carrefour important dans la région.

La piste assez bonne jusqu'à Cimo devient assez infernale vite après. On s'enfonce un peu plus dans la montagne et  la piste est maintenant très rocailleuse rendant la progression très lente et difficile. Par moment on ne doit pas faire plus de 10 km/heure. Mais les paysages sont grandioses et on a l'air tout petit dans cette immensité. Ca nous donne une incroyable sensation de liberté.
A la recherche de notre prochain bivouac, on trouve une petite piste balisée qui semble rejoindre la côte. Elle slalome au milieu des acacias dont les branches griffent notre pauvre Totoy dans un bruit strident. Nous avons de plus en plus de mal à avancer mais le jeu en vaut la chandelle. Nous arrivons sur le site magnifique de notre nouveau bivouac qui surplombe d'une hauteur incroyable l'océan au loin. Nous nous installons pour admirer un coucher de soleil absolument splendide, nous sommes seuls au monde.

 

Samedi 8 Mai

Nous faisons chemin inverse pour retrouver la piste principale. Bien plus tard, à notre grande surprise, nous croisons 2 véhicules. Finalement, la piste n'est pas si horrible qu'on le craignait. Peu avant Lucira on quitte le groupe pour aller au village. La route goudronnée que nous avons retrouvée ne dure pas longtemps : elle a été emportée, probablement par la rivière en crue qu'un pont maintenant isolé enjambe. Les nombreuses pistes de contournement qui empruntent le lit de la rivière à sec, nous permettent d'arriver à Lucira dans l'après midi. 

Il règne ici une tranquillité extrême. Rien à vendre, rien à acheter. On marche le long de la plage de sable clair, les gosses continuent à jouer. On aperçoit au loin d'anciens grands bâtiments : il y a dû avoir de l'activité mais il y a longtemps. On repart pour rejoindre les autres. Sur le bord de la route, quelques bergers gardent leur troupeau. Ils nous donnent vraiment l'impression d'être en Afrique australe avec leur allure longiligne style Masai, le torse nu, appuyé sur leur bâton, vêtu d'une sorte de jupe et d'une paire de baskets !

Peu après Lucira, les paysages changent brutalement et sont fantastiques. Les montagnes ravinées par les ruissellements forment un relief des plus étranges et arborent des couleurs incroyables avec en fond une oasis verdoyante. Puis, ce sont des plateaux immenses et d'une platitude infinie qui succèdent.

Nous parvenons ensuite au superbe coin de plage où nous rejoignons nos compères. Les rouleaux de l'Atlantique déferlent, on se sentirait presque chez nous !

Comme tous les soirs depuis notre rencontre, nous faisons un feu pour faire la cuisine. Cette fois-ci, on l'apprécie d'autant plus qu'on commence à avoir froid chose qu'on n'imaginait plus depuis bien longtemps.

 

Dimanche 9 Mai

On poursuit la piste. Le sentiment de désolation des paysages est accentué par le ciel gris et la présence d'une brume matinale. On s'arrête à un phare complètement abandonné, on dirait que cet endroit est tombé dans l'oubli depuis de nombreuses années. Le goudron s'améliore de plus en plus et nous arrivons à Namibe assez vite. C'est dimanche et tout est fermé mais je doute fort qu'il y ait encore grande activité ici. On dirait vraiment une ville en pleine décrépitude. Finalement on se ravitaillera à Lubango. La plage est noire de monde et des enfants font des acrobaties de toute sorte. 

Au bout de l'avenue on découvre un camping propre et bien aménagé, peut être que l'été, c'est un lieu de villégiature apprécié. On se contente d'y pique-niquer au calme, n'ayant pu trouver une gargotte ouverte et proposant de quoi manger. En quittant la ville on aperçoit furtivement trois femmes assises avec des bracelets de cuivre aux jambes, les seins bandés et un pagne leur servant de coiffe. On remonte en arrière pour trouver l'embranchement pour Lubango et on s'arrête un peu plus loin pour bivouaquer.

 

Lundi 10 Mai


Nous nous levons au petit jour et pendant que nous nous préparons, un jeune berger s'approche. Il nous salue et observe tranquillement tout ce cirque très inhabituel pour lui. Nous nous dirigeons ensuite vers la chaine montagneuse en haut de laquelle se trouve Lubango. Depuis que nous roulons, cette superbe barrière rocheuse s'offre en point de mire. La majorité des habitants sont vêtus de leur habit traditionnel et c'est un superbe spectacle que de les croiser sur la route.

Nous entamons la montée et nous progressons lentement. Les côtes sont rudes et les voitures peinent mais la raison principale c'est qu'on ne cesse de s'arrêter pour admirer les points de vue magnifiques sur les vallées qu'on découvre à chaque virage. Le summum est atteint lorsque nous franchissons le col après les derniers lacets incroyablement rapprochés. La route bifurque sur le plateau pour s'arrêter en face, nous permettant ainsi de jouir d'une vue fantastique sur les plaines des alentours.

Nous traversons maintenant des terres plates, cultivées ou servant à l'élevage. La population de plus en plus dense nous confirme que nous nous rapprochons de Lubango. C'est une ville très étalée et très bizarre. On voit beaucoup de bâtiments délabrés mais aussi des commerces vendant des produits derniers cris. Notre arrêt a provoqué un petit attroupement de jeunes et pendant qu'on s'organise pour que chacun puisse faire ce dont il a besoin, Connie sort de sa voiture affolée : elle vient de se faire voler sa pochette. C'est arrivé très vite alors qu'elle était toujours dans la voiture. Le voleur a profité de la confusion autour de nos véhicules pour dérober en une fraction de seconde, la fameuse pochette. Très vite, on nous montre quelque chose sous notre voiture. C'est la pochette, elle a été vidée de son argent mais fort heureusement les passeports y sont toujours et c'est vraiment le plus important.

Nous ne voulons pas nous attarder ici mais nous devons absolument trouver du gas-oil. A la première station, il n'y en a pas, ni à la deuxième d'ailleurs. Un couple nous prend en charge et parcourt toute la ville avec nous pour trouver du carburant. Finalement, on parvient à trouver cette denrée rare. On ne se fait pas priés pour quitter la ville. 

La route est maintenant horrible, farcie d'énormes nids de poule qui nous obligent à slalommer ou à rouler à cheval sur les bas-côtés. On n'avance pas et c'est vraiment pénible. En plus Pinzie, le camion étrange de Urs et Elza commence à fumer sérieusement. Il consomme de l'huile et ce n'est généralement pas bon signe. On décide de s'arrêter pour examiner le problème de plus près. Mais en s'engageant hors piste, Slade tape une très grosse pierre en la trainant sous sa voiture. Décidément, ce n'est vraiment pas une bonne journée et il faut en finir au plus tôt.

Slade analyse les dégâts et heureusement aucun organe vital n'est touché. Il y a juste quelques pièces à redresser de bons coups de marteaux mais le vieux Land de Slade en a vu d'autres. Pour Pinzie, c'est plus délicat. Pendant que les garçons sont tous affairés autour du moteur qu'ils démontent en partie, nous discutons entre filles en espérant secrètement que ça ne sera pas trop grave. Régulièrement on nous tient informés de l'évolution du diagnostic. En fin de soirée, les mécaniciens en arrivent à la conclusion suivante : c'est un guide de soupape qui est cassé entrainant ainsi une forte consommation d'huile et une combustion sur trois cylindres (tout le monde a suivi ?). Bref, c'est pas gagné mais ils ont quelques idées pour bricoler une réparation de fortune le lendemain matin.

 

Mardi 11 Mai

La matinée étant vouée à la mécanique, j'en profite pour dormir un peu plus longtemps. Petit à petit, j'entends des voix enfantines qui se rapprochent. De petits gamins et gamines se sont installés juste derrière notre voiture pour admirer le spectacle qui se livre sous leurs yeux. Je peux les observer dans l'entrebaillement des portes arrières tandis qu'eux ne me voient pas. C'est un vrai plaisir de voir leurs yeux ébahis et leurs mimiques tantôt d'étonnement tantôt d'amusement.

Je me lève et prépare le petit déjeuner. Je leur fais du thé à la menthe bien chaud pour les réchauffer car il fait frisquet. Je leur fais goûter ce nouveau breuvage, ils semblent surpris mais ils apprécient. Le plus frappant, dans ces moments, c'est comment ils s'appliquent à ce que tout le monde ait bien sa part.

Chacun de nous vaque à ses occupations en attendant l'heure du départ. A un moment, un des gamins vient vers moi et m'offre une grosse tige et me fait signe de manger. C'est un peu sucré il doit s'agir de canne à sucre sauvage. Un peu plus tard, je les entends crier. Bayo, effrayé par le remue ménage autour du Pinzie, vient de se réfugier dans leur coin et le chien sème un courant de panique chez les enfants. J'essaie de les rassurer en caressant Bayo mais seuls les plus téméraires osent se montrer. Les autres restent cachés derrière. Le signal du départ est donné et nous quittons ces gosses adorables pour continuer doucement sur la route horrible.

Malgré la réparation, Pinzie consome de plus en plus d'huile et nous devons régulièrement nous arrêter pour vérifier le niveau. Cette fois-ci, il n'y en a plus et il faut envisager une autre solution. A force de cogiter, les garçons trouvent une autre option et ils font la mécanique sur place. Nous repartons mais quelques kilomètres plus loin, nos espoirs s'envolent en fumée et le verdict tombe : Pinzie ne peut plus continuer comme ça sinon le moteur risque d'y passer. Après réflexions, Slade propose de le tracter. Vu l'état de la piste, c'est un choix délicat mais il n'y a plus d'autre issue. Seul point positif, nous avons fini de traverser les montagnes. Nous avançons à 20 km/h. De toute façon, on ne peut pas aller plus vite sur cette route ignoble.

Nous continuons ainsi jusqu'à Cahama en espérant trouver une solution meilleure et peut-être un moyen de réparer. Au bivouac, l'ambiance s'en ressent et la soirée est bien moins joyeuse que d'habitude même si le moral est toujours là. Pour notre part, nous avons un choix crucial à faire. En effet, notre visa expire demain et nous sommes encore loin de la frontière de la Namibie. Compte tenu des conditions de la route, nous envisageons de prendre la piste que nous avait conseillée Mario qui part de Cahama jusqu'à Ruacana nous économisant ainsi une bonne centaine de kilomètres. Mais nous n'avons pas envie d'abandonner nos amis surtout dans de tels moments. D'un autre côté, si les douaniers procèdent comme pour certains voyageurs passés, on risque jusqu'à 1000 dollars d'amende par jour expiré ! Par ailleurs, nous ne connaissons pas l'état de la piste mais ce sera difficilement pire que la route même si c'est toujours possible. Bref, tout ça tournicote dans nos têtes et une seule chose est sûre pour l'instant, on se lèvera très tôt demain matin. 


Mercredi 12 Mai

Au lever, notre décision est prise, nous tenterons la piste vers Ruacana. Tout le monde est déjà debout et nous avons même des villageois voisins qui sont venus nous rendre visite. On se réunit autour du feu car il fait frais et nous faisons nos adieux temporaires. Nous espérons nous retrouver dans maximum 2 jours à la première ville côté Namibien.

Nous retournons sur Cahama pour trouver la piste. On a un peu de mal à repérer mais les habitants nous mettent sur la voie. A notre grand soulagement la piste est très roulante. Elle nous offre aussi de beaux paysages très doux de forêts vertes d'arbustes mise en relief par les herbes jaunes pâles qui tapissent le sol et la latérite ocre de la piste.

La piste qui part ensuite devient plus dure car nous attaquons une zone montagneuse. Dans les petites plaines qui séparent les collines, on voit de temps en temps des champs clôturés et des troupeaux de zébus qui déambulent. Les villageoises sont en  tenue traditionnelle : un pagne pour le bas et de nombreux colliers de perles à la ceinture ou autour du cou.

Le relief s'adoucit et la piste s'améliore nous conduisant à Chitago qui a plus l'allure d'un village fantôme qu'autre chose. On récupère la piste principale pour Ruacana qui nous rapproche de la Namibie. Peu après, on rencontre un groupe de femmes Himbas assises à l'ombre d'acacias. Elles sont reconnaissables entre toutes. Elles s'enduisent le corps et les cheveux d'un mélange à base de beurre et de terre rouge pour se protéger du soleil et préserver la jeunesse de leur peau. Une peau de chèvre tanée leur sert de jupe, un superbe coquillage orne leur poitrine mais surtout elles sont couvertes de colliers et bracelets constitués de pièces de fer des plus hétéroclites. On y voit pêle mêle des écrous, des boulons, des rondelles, des clés, des douilles de balles, des maillons de chaînes de vélo le tout enduit de cette pommade ocre. La richesse de leurs accessoires est impressionnante et leur coquetterie aussi. Quand on est arrivé à négocier de les prendre en photos, elles passent cinq bonnes minutes à s'apprêter devant l'appareil. L'une d'entre elles porte un petit bébé dans ses bras qui a déjà les attributs Himba. 

Nous repartons, ébloui par tant de beauté et le sentiment que le temps n'a aucune prise sur ce peuple quand nous évitons de justesse des motos de cross qui arrivent en face : les temps modernes ont tôt fait de nous rattraper.   

Comme on est dans le bon timing, on s'arrête déjeuner au lac de barrage avant d'attaquer le passage de la frontière. Côté Angola, des bâtiments délabrés avant d'avoir été terminés font office de bureau. De l'autre côté un superbe édifice récent avec les drapeaux namibiens colorés qui flottent nous montre bien que c'est plus une frontière entre deux mondes qu'entre deux pays que nous allons traverser. Une fois qu'on a réussi à trouver où ça se passe, les formalités se passent facilement et dans la convivialité. Pas de problème avec notre expiration éventuelle de visa qui aurait pu susciter une interprétation litigieuse. 

Avant de passer en Namibie, nous faisons un crochet de quelques mètres pour admirer les magnifiques chutes de Ruacana situées dans le no man's land entre les deux pays. Une fois rassasiés du fabuleux spectacle de la nature nous passons en Namibie.

 

 


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